Felix Marcoux

Critique de Ni no Kuni 2: Revenant Kingdom

— TYPE DE PROJET

Projet personnel


— RÔLE

Auteur


— DATE

Mars 2021

Ceci est une critique que j’ai écrite dans le cadre du processus d’acceptation au programme scolaire de design de jeu à l’UQAT. Ce texte ne visait pas à recommander ou à donner une note au jeu, mais plutôt à analyser différents aspects du jeu selon mon expérience pour voir ce qui était bien ou moins bien fait. Avant l’écriture, j’ai fait des recherches pour voir quelle était la structure d’une bonne critique et j’ai tenté de couvrir les points les plus importants du jeu sans trop divulgâcher. Voici donc le résultat final…

Introduction

Les jeux de rôles sont le genre de jeu avec lesquels j’investis la majorité de mon temps. La majorité des titres auxquels j’ai joué m’ont offert des expériences qui, malgré leurs défauts, m’ont pour la plupart laissé avec un sentiment de satisfaction. J’ai eu une expérience similaire avec Ni no Kuni 2: Revenant Kingdom, un jeu de rôle d’action à la troisième personne designé par Kengo Shibata et Yuirichi Shibase et développé par Level-5 en 2018. Ce jeu se joue à un joueur et raconte les aventures du jeune roi Evan Pettiwhisker Tildrum dans sa quête de créer une nouvelle nation à la suite d’un coup d’état dans son royaume d’origine. Ce jeu, bien qu’amenant peu d’éléments novateurs pour le genre, a tout de même réussi à offrir une expérience divertissante. Il est à noter que j’utiliserai ici les noms anglais des personnages et des termes employés par le jeu.

Trame narrative

L’histoire débute alors que Roland Crane, l’un des personnages principaux et chef d’état de la plus puissante nation du monde, est transporté dans un autre univers à la suite d’un cataclysme dans son pays. Il se retrouve alors au beau milieu d’un coup d’état au royaume de Ding Dong Dell, une nation où chats et souris anthropomorphiques coexistent, mais où les chats règnent depuis longtemps. Roland rencontre alors le fils du roi décédé, Evan, et l’aide à échapper à ceux qui tentent d’atteindre à sa vie. Cette introduction est un bon moyen de plonger immédiatement le joueur dans le bain et m’a donné une bonne impression initiale du jeu.


Suite à l’évasion d’Evan et de Roland, Evan fait part de son désir de créer un monde où ce genre de chose n’arriverait plus jamais et où les citoyens seraient à jamais heureux. Les 2 compères partent donc à la recherche d’un « Faiseur de roi », une espèce de créature qui, comme son nom l’indique, sert à légitimer l’accession au trône à ceux jugés dignes. À partir de ce moment, l’histoire du jeu guide le joueur vers la construction et l’expansion du nouveau royaume d’Evan ainsi que les interactions qui s’ensuivent avec les monarques des nations voisines. La progression de l’histoire est linéaire et ne permet pas d’aller visiter un autre royaume avant d’avoir réglé les problèmes du royaume précédent, ce qui est un peu dommage. Cependant, cela fait du sens narrativement, puisque chaque royaume donne le moyen d’accéder à la nation suivante après avoir réglé son problème.


Au cours du jeu, Evan est amené à régler les problèmes des autres dirigeants et leur faire signer un traité de paix. C’est cette partie du jeu qui constitue la majorité des chapitres de Ni no Kuni 2. Tous les royaumes ont un monarque ayant de bonnes intentions, mais leurs actions finissent par brimer les droits de leurs citoyens. Pour ne prendre qu’un exemple, l’une des nations visitées par Evan est Goldpaw, un pays clairement inspiré par la culture japonaise traditionnelle et où tout est décidé par la chance. Son roi veut que le royaume soit reconnu pour sa richesse. Cependant, pour y arriver, il taxe sévèrement ses citoyens, rendant la plupart d’entre eux endettés envers le gouvernement. Chaque chapitre consacré à une nation possède une progression similaire: découvrir un problème dans la façon de régner du dirigeant, éliminer la source du problème et demander la signature du traité de paix. Malgré certaines variantes vers les derniers royaumes visités, cette structure demeure sensiblement la même. Cela pourrait être un élément négatif pour certains à cause de la prévisibilité que cela peut causer. Cependant, je trouve que les situations rencontrées dans chaque pays sont des expériences suffisamment différentes l’une de l’autre pour lui pardonner ce défaut.


Je ne décrirais pas plus loin le reste de l’histoire, sauf pour mentionner qu’au cours du jeu, Evan et ses compagnons prennent connaissance d’un mal plus grand qui menace les nations voisines. Cette structure narrative est présente dans plusieurs autres jeux de rôles et Ni no Kuni n’y fait pas exception. Somme toute, malgré la prévisibilité de certains passages de l’histoire, ce fût tout de même une expérience agréable qui aborde des sujets parfois sensibles sur comment un pays devrait être dirigé. Voir l’évolution d’Evan, passant d’un enfant effrayé à un dirigeant mature, est également satisfaisant. Le monde est visuellement très attrayant et il m’est arrivé de simplement m’arrêter pour regarder certains paysages spectaculaires. Ma seule déception est que certaines informations données vers la fin m’ont laissé perplexes et c’est seulement après un peu de recherche que j’ai découvert que ce sont des informations données dans le premier jeu de la série. Plusieurs concepts auraient plus être mieux expliqués dans cet opus afin que la finale soit plus satisfaisante pour les néophytes de la série.

Mécaniques principales

Le système de jeu est séparé en 2 parties importantes: l’exploration et la gestion de royaume. La première est introduite au tout début du jeu et la deuxième est quant à elle déverrouillée tôt dans l’histoire. La partie d’exploration englobe l’exploration du monde, la visite des différents royaumes et les combats. Les deux premières parties s’expliquent d’elles-mêmes tandis que les combats sont séparés en 2 catégories : le combat en jeu de rôle d’action et les opérations

militaires.


Les combats en jeu de rôles d’action sont relativement aisés et se terminent rapidement en mélangeant attaques rapides et roulades. Le joueur peut également lancer des sorts et des habiletés grâce à des points de mana obtenus grâce à la consommation d’objets ou accumulés à force de frapper l’ennemi. Il existe d’ailleurs une large gamme de design d’ennemis différents, ce qui est tout à l’honneur du jeu. Somme toute, les combat de ce genre dans Ni no Kuni 2 sont simples à prendre en main. Toutes les explications des tutoriels sont relativement claires à comprendre et peuvent être revues hors de combat si besoin est. Ni no Kuni 2 introduit également éventuellement l’espèce des Higgledy, des petits esprits présents dans le premier jeu pouvant aider le joueur sur le champ de bataille. Ils apportent une aide bienvenue pour certains combats, mais nécessitent que le joueur s’arrête une ou deux secondes pour les appeler, le rendant vulnérable. Les effets qu’ils apportent lors des combats peuvent apporter une source de dégâts ou de défense supplémentaire pour un moment, ce qui justifie suffisamment le désavantage mentionné plus haut.


En ce qui concerne les opérations militaires, le joueur prend le contrôle d’une petite armée constituée de quatre troupes. Il existe 4 types de troupes, trois d’entre elles étant faible contre un type et forte contre un autre type. Le jeu laisse une indication visible des forces de chaque troupe tout au long de l’opération, ce qui est très apprécié tout au long du jeu. Les opérations militaires consistent pour la plupart à progresser sur la carte notre armée et vaincre les forces ennemies. Même si ce type de combat ne m’a pas intéressé de prime abord, j’ai tout de même fini par l’apprécier après avoir continué d’en faire. Voir notre armée envoyer valser l’ennemi est satisfaisant et certaines opérations requièrent parfois un certain degré de stratégie.

Quant à la gestion du royaume, elle consiste à construire de nouveaux bâtiments et recruter de nouveaux citoyens dans notre nation. Recruter des citoyens se fait en progressant dans l’histoire principale ou en complétant des quêtes optionnelles. La grande quantité de citoyens à recruter vient avec un bon et un mauvais côté. J’arrivais à me rappeler de la majorité des résidents de mon royaume et ce qui les a menés à rejoindre la cause d’Evan. J’ai donc conservé un certain lien avec la majorité d’entre eux malgré la multitude de visages et c’est un bon point. Malheureusement, avec une multitude de visage venait une multitude de quête, et la majorité d’entre elles ont le même objectif : vaincre un monstre ou aller chercher un objet. En ajoutant à cela la réutilisation massive des mêmes environnements pour les différents donjons, même si le contexte était différent, la majorité des quêtes se ressemblaient énormément et je n’ai comme souvenir que le contexte dans lequel je les ai faites. Construire de nouveaux bâtiments nécessite une nouvelle monnaie qui s’accumule avec le temps. Au début, j’aurais dit que c’est un élément négatif, mais j’ai réalisé avec le temps que cette manière était probablement pour le mieux. C’est une tentative de se différencier des jeux incluant des éléments de construction, ces derniers nécessitant souvent que le joueur accumule certains objets pour construire quelque chose. En faisant en sorte que les ressources s’accumulent passivement, cela permet au joueur d’alterner aisément entre exploration et construction sans se préoccuper de chercher des objets particuliers, leur permettant donc de mieux profiter des paysages du jeu.


Malgré quelques faux pas, j’ai majoritairement apprécié ce que ce jeu a tenté de faire en ce qui concerne ses mécaniques. Le système de gestion de royaume est agréable et permet de sentir un réel sentiment de progression lorsque de nouveaux bâtiments sont construits ou que des recherches sont menées à terme. Le fait que certains citoyens soient plus adaptés pour certaines tâches est aussi une touche appréciée, même si elle peut mener au problème de ne plus vouloir déplacer un citoyen d’une tâche précise. Une amélioration possible suggérée serait de donner au joueur la possibilité de modifier la position des bâtiments de son royaume. Cela donnerait au joueur la liberté de façonner son royaume tel qu’il le désire au lieu de seulement pouvoir construire un bâtiment précis à l’endroit qui est spécifié sur la carte.

Le combat dans Ni no Kuni 2 possède quant à lui plusieurs points faibles. Par exemple, j’ai personnellement vu peu d’intérêt à utiliser les attaques chargées, préférant largement les attaques rapides qui peuvent s’exécuter beaucoup plus rapidement pour un ratio de dommage plus grand. De plus, utiliser des attaques rapides me permettaient en conséquence de pouvoir lancer des sorts plus souvent. Également, le fait de permettre le choix entre effectuer des roulades pour éviter des dégâts et bloquer pour seulement prendre une partie des dommages mène à un problème que l’on peut remarquer dans d’autres jeux de rôle comme Dark Souls (FromSoftware, 2011). Bloquer m’est vite apparu comme nettement moins efficace que la roulade et j’ai donc ignoré cette mécanique pour une grande partie du jeu. Même après avoir pris connaissance que certains ennemis pouvaient être étourdis si je bloquais au bon moment, je revenais inévitablement à l’utilisation de la roulade. Une solution pour rendre le blocage plus intéressant pourrait être de réduire un peu plus les dégâts reçus en bloquant ou permettre un enchaînement d’attaque spécial lorsqu’un ennemi est bloqué au moment propice. Un bon point à noter pour les combats est que la difficulté est réglable en tout temps pour satisfaire tous les types de joueurs.


Finalement, deux derniers points décevants concernent l’exploration du monde. Premièrement, pour des raisons narratives, un type de puzzle introduit dans l’un des premiers chapitres ne refait pas d’apparition, ce qui est dommage considérant les possibilités qu’il aurait pu amener. Deuxièmement, l’un des véhicules débloqués au fil de l’aventure, un bateau, devient totalement obsolète lorsque le joueur obtient accès au véhicule suivant en progressant l’histoire. Ce nouveau moyen de transport peut aller pratiquement partout sur la carte du monde, sauf dans l’eau. Malheureusement, il n’y a pratiquement rien à faire dans les étendues d’eau du jeu à part amasser des objets qui sont alternativement récoltables dans notre royaume. Ceci rend inutile toutes les améliorations achetées pour améliorer le bateau et nullifie toute raison de l’utiliser à partir d’environ la moitié du jeu. Une façon simple de contrecarrer ce problème aurait été d’ajouter plus de contenu sur les étendues d’eau du monde, empêcher la production des objets marins rares dans le royaume ou bloquer l’accès à certaines îles pour le nouveau véhicule. En général, les éléments négatifs mentionnés plus haut n’empêchent pas le joueur de passer un bon moment avec le jeu, mais ce sont des éléments de design douteux dans ce qui est autrement un bon jeu.

Bande sonore

La trame sonore de Ni no Kuni 2 a été composée par Joe Hisaishi et joué par l’Orchestre Philarmonique de Tokyo. La musique grandiose du menu principal (qui devient également plus tard la musique jouée lors de la gestion de royaume) donne une très bonne première impression du jeu et aide à faire sentir le joueur comme un monarque. Les pièces musicales des différents boss sont également grandioses et donnent envie de les réécouter. Malheureusement, à part pour une ou deux autres pièces, les musiques présentes dans le jeu ne sont pas très mémorables. Dans le pire des cas, selon le temps passé dans chaque environnement où elles sont jouées, ces pièces musicales peuvent même finir par être très répétitives et agaçantes. De plus, bien que je m’y fasse éventuellement et qu’elles soient plus appréciables à mes yeux après avoir joué un certain temps, les musiques d’ambiance de certains des royaumes visités au cours du jeu m’apparaissaient comme n’étant pas à leur place. Pour finir, rien de négatif n’est à dire sur la qualité des effets sonores utilisés dans Ni no Kuni 2. Ils permettent de bien sentir l’impact de chaque coup donnés et reçus et sont toujours satisfaisants.

Conclusion

Finalement, Ni no Kuni 2 ne fait pas de vagues dans le monde des jeux de rôles et souffre de plusieurs faiblesses dans son design narratif et dans ses mécaniques. Cependant, comme il a été démontré plus haut, il existe plusieurs moyens de régler ces problèmes et ces derniers pourraient élever Ni no Kuni 2 parmi certains des grands titres des jeux de rôles. L’univers est charmant et les différentes mécaniques nécessitent simplement d’être mieux polies et plus explorées. Si une suite de ce jeu voit le jour dans le futur et que les faiblesses de cet opus n’y sont pas présentes, elle aura le potentiel d’être un vrai un chef-d’œuvre.